À Charleroi, la précarité est un ensemble. Elle se trouve partout: ses rues sales, son métro inachevé, ses passages glauques, ses zones industrielles vides. On s'y sent menacé en permanence par une présence. Pourtant, aucun événement ne surviendra jamais dans ces endroits désertés et fuis. Là où autrefois l'industrie minière connut un âge d'or, ne reste qu'aujourd'hui l'ennui, la tristesse et la ruine. La page du charbon et de l’acier semble définitivement tournée, sans qu’une nouvelle ne soit réellement ébauchée. Les bâtiments vidés de leurs occupants reflètent leur désarroi, ceux encore habités paraissent insalubres voire abandonnés. Le faste du passé et sa vie quotidienne, les lieux que les travailleuses et travailleurs occupaient, s’offrent au regard dans une mise en scène de décrépitude. Cette imposante brasserie a désormais une allure fantomatique ; ce parc d'expositions ne voit plus passer un seul visiteur ; ou cette cathédrale et ce beffroi dont les cloches ne semblent plus sonner. Quand à cette station de métro : Providence, qui ne dessert plus qu’un boulevard crasseux et sans trottoir jalonné par des usines désaffectées. Là où le chômage dépasse un quart de la population active, se profile la chute de notre société soi-disant moderne.